Les boissons sucrées responsables d'un cas de diabète sur dix
BOSTON / GENÈVE/ LAUSANNE - Les boissons sucrées sont responsables d'un cas de diabète sur dix dans le monde. En outre, une maladie cardiovasculaire sur trente est directement liée à la consommation de ces sodas, selon une vaste étude publiée lundi dans la revue Nature Medicine (DOI : 10.1038/s41591-024-03345-4).
Des mesures politiques sont donc urgentes, souligne l'équipe de recherche internationale dans l'article. L'Amérique latine et les Caraïbes sont particulièrement touchées : près d'un quart des cas de diabète de type 2 dans cette région sont dus aux boissons sucrées. C'est l'Afrique subsaharienne qui a connu la plus forte augmentation de ce type de diabète entre 1990 et 2020, avec 8,8%.
En Suisse, les scientifiques ont attribué 10,5% des cas de diabète de type 2 diagnostiqués en 2020 à la consommation de boissons sucrées, a indiqué à Keystone-ATS Laura Lara-Castor, de la Tufts University à Boston (USA), auteure principale de l'étude.
En ce qui concerne les maladies cardio-vasculaires, les boissons sucrées étaient responsables au niveau mondial comme en Suisse de 3,1% de tous les nouveaux cas.
La Suisse légèrement au-dessus de la moyenne
Pour cette étude, les scientifiques ont utilisé les données de 184 pays issues de la "Global Dietary Database" et d'autres enquêtes, ainsi qu'un modèle spécial tenant compte de différents facteurs tels que la consommation moyenne et les risques pour la santé.
Résultats: en 2020, 2,2 millions de nouveaux cas de diabète de type 2 et 1,2 million de nouvelles maladies cardiovasculaires dans le monde étaient imputables aux boissons sucrées, ce qui correspond à 9,8% de tous les nouveaux cas de diabète de type 2 et à 3,1% de tous les nouveaux cas de maladies cardiovasculaires.
En Suisse, la consommation de sodas, limonades et boissons énergisantes était jugée responsable de 3750 diabètes de type 2, soit 10,5% des cas, a précisé Laura Lara-Castor. Légèrement au-dessus de la moyenne, les chiffres de la Suisse sont comparables à ceux d'autres pays européens comme l'Allemagne, l'Autriche, l'Espagne et la Suède.
Intérêts commerciaux et manque d'eau
Ces chiffres sont en revanche nettement plus élevés pour l'Amérique latine, les Caraïbes et l'Afrique subsaharienne. Selon l'étude, 24,4% de tous les cas de diabète en Amérique latine sont imputables aux boissons sucrées, et 21,5% en Afrique subsaharienne. La Colombie est en tête de liste: près de la moitié (48,1%) de tous les cas de diabète en Colombie en 2020 sont attribués à la consommation de boissons sucrées.
Ces pays sont également en tête en ce qui concerne la consommation de boissons sucrées par habitant. Les scientifiques citent dans l'étude les intérêts commerciaux multinationaux et locaux comme "moteurs probables" de ce phénomène. Ainsi, les entreprises encourageraient la consommation de leurs produits par un marketing ciblé tout en bloquant les mesures politiques visant à réduire la consommation.
De plus, selon les scientifiques, le manque d'eau potable dans des pays comme le Mexique et la Colombie aggrave le problème, car les boissons sucrées sont souvent consommées comme substitut.
Occidentalisation de l'alimentation
Entre 1990 et 2020, la proportion de cas de diabète imputables aux boissons sucrées a augmenté de 1,3% à l'échelle mondiale. Selon Mme Lara-Castor, une légère augmentation (0,6%) a également été enregistrée en Suisse. Durant cette période, l'incidence des maladies cardiovasculaires causées par les boissons sucrées est restée stable à l'échelle mondiale et a même diminué de 0,1% en Suisse.
Les auteurs ont toutefois constaté de grandes différences selon les régions. C'est en Afrique subsaharienne que l'augmentation a été la plus forte: la part des cas de diabète de type 2 causés par les boissons sucrées a augmenté de 8,8%, celle des maladies cardiovasculaires de 4,4%.
Les scientifiques attribuent ces résultats à un "changement de régime alimentaire". Les régimes traditionnels, souvent plus sains, se sont déplacés dans cette région et dans d'autres vers des régimes plus occidentaux, riches en aliments transformés, en sucre et en graisses.
Selon les auteurs, des mesures politiques efficaces sont nécessaires. Outre des taxes sur les boissons sucrées, l'étude propose un étiquetage obligatoire, une réglementation de la commercialisation des sodas et une amélioration de l'approvisionnement en eau potable.
Plus de 200 institutions du monde entier ont participé à cette étude internationale, dont les Hôpitaux universitaires de Genève et de Lausanne pour la Suisse.
Le 6 janvier 2025. Sources : Keystone-ATS. Crédits photos: Adobe Stock, Pixabay ou Pharmanetis Sàrl (Creapharma.ch).